Coups de coeur de lecture en juin

Coups de coeur de lecture en juin

Prochaine réunion pour échanger sur des lectures : jeudi 15 juin à 18 h

Parmi les activités de l’association Vivre aux Chaprais : les réunions mensuelles d’échange de coups de coeur de lecture .
La prochaine, ouverte à tous, aura lieu ce jeudi 15 juin à partir de 18 h salle 4 au Centre Pierre Mendès France.

Voici quelques exemples de livres présentés à ces réunions

Le naufrage de Venise d’Isabelle Autissier (Stock)

Le naufrage de Venise
Venise n’existe plus, submergée par une vague gigantesque, elle s’est effondrée avec tous ses palais centenaires, le Tiepolo, le Genovese, le Grand Canal est encombré de murs écroulés, tous les habitants ont été évacués, les gondoles se sont éventrées sur des amoncellements de briques, broyé le pont des soupirs.
Guido, conseiller aux affaires économiques de la ville, après un long séjour à l’hôpital a emprunté une vedette pour voir les dégâts. C’est un spectacle effroyable, fantomatique et silencieux qui l’accueille dans ces ruines où ne résonnent plus les cris des touristes, des gondoliers et qu’aucun bateau ne sillonne.
Ainsi commence le roman d’Isabelle Autissier connue pour son engagement pour la préservation de la planète et il continue par un long flash-back.

Trois personnages le dominent. Guido, sa femme Maria Alba et leur fille Léa. Le premier, d’origine modeste, a
réussi à se hisser à un poste politique important où il œuvre pour l’essor de la ville en tablant sur la richesse que représente la manne touristique dont les retombées rempliront les poches des habitants malgré les inconvénients liés à la présence de bateaux gigantesques qui déflorent la lagune et le paysage. Il croit en l’efficacité du système MOSE pour protéger Venise des inondations par les eaux de l’Adriatique, l’acqua alta, et des grandes vagues.
Maria Alba est issue d’une famille de nobles Vénitiens, se réfugie dans la splendeur passée et mène une vie oisive et décalée. Léa leur fille de 17 ans, grâce à sa fréquentation d’un professeur de l’université engagé dans la lutte pour le sauvetage de Venise, va œuvrer etmiliter dans un groupe prêt à défendre la ville contre l’invasion touristique et les différents projets nocifs à sa survie. La famille va donc être déchirée par cette lutte.
J’ai bien aimé la façon dont un professeur mettait les étudiants devant un fait irréfutable :
Venise s’enfonce. Devant des tableaux de Canaletto (18 ème ) entre autres, il leur fait remarquer la ligne de « flottaison » des algues visible sur les palais, puis leur demande de faire des photos de ces mêmes palais pour comparer : preuve indiscutable. J’ai bien aimé aussi ces allées et venues entre le passé, le présent et le futur redouté mais inévitable. Ce livre incarne notre déni des dangers que l’homme fait courir à la planète.

Ginette

La lettre à Helga de Bergsveinn Birgisson

Lettre à Helga

L’auteur est un Islandais né en 1971, sa traductrice est bretonne mariée à un Islandais

L’histoire : Bjorni est un vieux paysan nonagénaire qui élevait des moutons. Il répond à sa bien-aimée Helga depuis la maison de retraite où il réside.
Bjorni a hérité de la ferme de ses parents après la guerre de 39-45. Il s’est marié à Unnur. Bjorni est un paysan intelligent qui est bien intégré dans sa communauté avec des responsabilités. Bref, ce n’est pas un gros plouc. C’est un homme sensible, poète à ses heures.
Il tombe amoureux d’Helga, la fermière voisine. On pourrait dire qu’il ne conclut pas tout de suite, mais il conclut, ce qui nous vaut des passages érotiques et originaux.
Mais leur liaison sera difficile. Le choix entre Helga et sa ferme est cornélien.

Mon avis : J’ai trouvé ce récit rafraîchissant, pas seulement parce que cela se passe en Islande. ll parle de la nature, des travaux des champs, de la vie sociale. Il y a de l’humour, parfois un peu noir. C’est un beau roman d’amour. L’amour d’une femme et de la terre, le grand amour de sa vie.

MF

Un homme sans titre de Xavier Le Clerc Gallimard

Un homme sans titre

Un livre court de 120 pages que l’on dévore en une soirée. Hamid Aït-Taleb est le vrai nom de l’auteur qui en a changé alors qu’il désespérait d’obtenir un entretien d’embauche.
« Mon nouveau nom avait brisé le plafond de verre » écrit-il. Nul doute qu’il ne soit pas étranger à sa réussite ! On en est toujours là en France.
L’auteur raconte la vie de son père, Kabyle, illettré, venu en France après l’indépendance de l’Algérie, père de neuf ans. Il a vécu dans la misère comme ouvrier métallurgiste non qualifié en Normandie, vendant tous ses meubles pour nourrir sa famille, colérique dès que l’argent manquait vers la 3 ème semaine du mois, ne prenant pas un jour de repos même lorsqu’il était malade ou après une opération, sans jamais se plaindre. Exilé, jamais il n’a trouvé de place
quelque part, pas plus en Kabylie qu’en France.
L’auteur ne dépeint pas son père comme un héros, mais à la fin du livre, c’est-à-dire à la mort de son père retourné en Algérie, il lui écrit une lettre touchante mais sans débordements. Il lui parle de Camus qui a bien connu la Kabylie et sa pauvreté, qui certes n’est pas enterré en Algérie comme le père, mais l’a beaucoup aimée. Il lui dit que les mots, les livres, l’école l’ont construit lui, comme la guerre et la faim ont construit le père, qui s’est déraciné pour que ses enfants s’enracinent en France. C’est un livre émouvant qui parfois nous révolte en tant que Français devant le peu de reconnaissance et d’empathie que la France a témoignées à ces ouvriers déracinés.

Ginette