Histoire de l’avenue Fontaine Argent (2) : architecture et notables
Suite du compte rendu de la conférence d’histoire des Chaprais consacrée à un Zoom sur l’avenue Fontaine Argent.
Surtout au début de l’avenue, de belles constructions sont réalisées pour des notables
Voici quelques exemples parmi d’autres
Au numéro 1, à gauche, dans l’îlot entre l’avenue Carnot et la rue de la Mouillère, on trouvait un bar, un coiffeur et un bureau de tabac. A droite, au numéro 2 se situait la société Werlein Frères. Werlein fonda avec deux autres francs-comtois la société des Docks de Franche-Comté. En 1901 est recensé Marie Liénard, concierge de Georges Edmond Meiner, maître de forges, gérant de Japy, baron d’Audincourt et propriétaire du château de l’Isle sur le Doubs. Pas encore de grand immeuble, mais une maison qui sera la propriété de la famille Joliot jusqu’à sa démolition en 1968.
Le propriétaire de l’immeuble au numéro 3 est Charles Jules Wehrle, directeur des Salines de Franche-Comté dont la direction commerciale se situait 20 avenue Carnot. En 1911, y réside un marchand de vins en gros Célestin Borey et son fils Emile. En 1918, l’immeuble est le siège de Pauteuil Frères marchand de bois et de charbon. En 1921 c’est un patron horloger : Louis Henri Pétolat qui avec son frère Georges et son beau-frère André Anguenot avait fondé en 1919 une entreprise dont le siège social est situé 7 avenue Denfert-Rochereau. En 1931 réside à ce numéro Marie Alfred Cantenot, directeur Général des Forges de Franche-Comté, composé de 22 établissements régionaux dont les Forges de Fraisans.
Côté pair, à l’angle avec la rue de la Mouillère, on peut noter grâce à la carte postale la présence au rez de chaussée d’un café épicerie, dès 1896, son nom demeura longtemps Café du Casino. A l’étage, un dentiste, en 1911 Charles Edouard Goupil des Pallières, beau-père de l’architecte Fernand Fuchs, lui-même propriétaire d’une partie de l’immeuble. Est aussi recensé ici le célèbre horloger Louis Leroy. Descendant d’une famille d’horlogers, fournisseurs de la famille impériale française à partir de 1805 puis de nombreuses têtes couronnées au cours du siècle. L’entreprise créa la montre restée la plus compliquée du monde pendant près d’un siècle (1900-1989)
L’immeuble est donc la propriété de Jeanne Goupil des Pallières épouse de Marie Fernand Fuchs, architecte de la ville (architecte de l’immeuble ?). La famille Fuchs est également propriétaire des numéros 6 (1913) et 8 de l’avenue. En 1921, on trouve Etienne Garnier, industriel fabricant d’outils dentaires dont l’entreprise est située rue du Tunnel. Il s ‘agit de l’actuelle Microméga
L’immeuble date de 1880. Un cartouche situé entre les fenêtres du premier étage et du second indique « Champs Elysées ». C’est le premier Immeuble de Besançon à posséder un ascenseur, qui ne desservait que le quatrième étage. Il a été supprimé. Les combles sont revêtues de peintures murales dues à un peintre bisontin Timothée Hacquard, qu’il aurait réalisées en 1895
Au n° 6, en 1965 réside un médecin, le docteur Wapler
Au n° 8, en 1901, on note la présence de deux professeurs au lycée Victor Hugo : François Thibault et Jean-Narcisse Perret, 3 horlogers et 2 institutrices; et plus tard Madame Dureuil professeur au lycée.
En 1926, réside le garagiste Tissier qui associé avec Daclin continuera plus tard avec la marque Fiat.
En 1936 y réside un commissaire de police Roger Pierre Regalli, ainsi que les époux Bastian qui furent assassinés dans le quartier Battant en 1944.
Henri Bugnet, avocat à la Cour d’Appel de Besançon y fut recensé. Membre du parti radical-socialiste, il devient maire en août 1939 suite à la mort de Charles Siffert. Après sa défaite en 1944 contre Minjoz, il revient à la tête de la ville de 1947 à 1950.
On trouve également à cette adresse un horloger Louis Marie Jules Charles.
Au n° 10, l’immeuble est en 1936, la propriété de Marcel Rein, frère de Léon Rein et beau-frère de Léopold Ullmo (rue des Chalets). En 1920, il avait créé avec ses frères Léon, Gustave et Aaron une activité de commissionnaire en quincaillerie (Rein frères) située rue d’Anvers. A cette adresse, est présent en 1911, Eugène Fournier, professeur d’université, géologue, ingénieur des Mines. Il fut le précurseur de la spéléologie en Franche-Comté.
On reparlera des n° pairs suivants à propos de la distillerie Faivre Chalon. Côté impair, à l’angle de la rue de Vittel (n°2), l’immeuble est remarquable avec sa coupole surmontée d’une pomme de pin
Ici résidaient des membres de la famille Lipmann. C’est l’occasion d’évoquer le parcours divergent de deux femmes célébres.
Celui de la fille de Germaine et donc la petite fille de Camille Lipmann, née en 1927 qui deviendra une actrice célèbre (au cinéma et au théâtre) sous le nom de Geneviève Page. Son parrain était Christian Dior, ami de son père Jacques Bonjean
Rose Pétrequin était domestique chez Lipmann. Elle prit la parole le 4 juin 1913 lors d’un meeting socialiste à Belfort contre la Loi imposant trois ans de service militaire. Elle épousa le 13 novembre 1913 Louis Oscar Frossard. Rose Frossard tint pendant la Première Guerre mondiale une rubrique féminine dans Germinal, journal de la fédération socialiste du Haut-Rhin, publié à Belfort ; elle en fut ensuite la responsable. En septembre 1918, Rose Frossard était la secrétaire de la fédération SFIO du Haut-Rhin. Elle apparut en février et mars 1921 dans L’Humanité comme participante à des souscriptions en faveur du développement du Parti socialiste – Section française de l’Internationale communiste (rebaptisé peu après Parti communiste). Leur fils André Frossard s’engagea dans une autre voie: il se convertit au catholicisme, écrivain, célèbre pour « Dieu existe, je l’ai rencontré », il fut éditorialiste au Figaro.
Au n° 15 bis, en retrait, une villa remarquable. Y est recensé un artiste peintre Léon Jayez. Son épouse Renée Marguerite Bérard est la veuve de François Léon Charpy, administrateur des Nouvelles Galeries et premier propriétaire de cette villa. Léon Jayez était un peintre régionaliste né en 1878 à Besançon et mort en 1957. Il fut également sculpteur, il exécuta notamment plusieurs petits bronzes représentant Georges Clémenceau.
La villa devient plus tard le Consulat suisse . Le terrain fut vendu, avec celui des pères capucins pour la construction de l’immeuble la Pyramide racontée dans un article par René Ostertag. La villa est actuellement la propriété du Crédit Mutuel des Professions de Santé de Franche Comté.
Au n° 17, en face la rue Beauregard, se situe la villa Germaine.
La villa Germaine fut achetée par Henri Marie Morel en 1907. Son nom vient sans doute du prénom du premier enfant de celui-ci Danielle Germaine. Henri Marie Morel, était officier de marine, son navire La Provence (ancien paquebot transatlantique utilisé pour le transport des troupes) fut coulé en 1916 par une torpille allemande en méditerranée, 912 personnes trouvèrent la mort sur les 1700 hommes embarqués
Compte rendu de la conférence d’histoire de Vivre aux Chaprais du jeudi 18 janvier 2024 animée par Delphine Lantuas. A suivre : L’avenue Fontaine Argent : des usines et des ateliers