Un tram se renverse place Flore

Un tram se renverse place Flore

Accident de tramway aux Chaprais … en 1908

Un nouveau reportage historique de Christian Mourey

Le réseau de tramway mis en place à Besançon à partir de 1897 comprend cinq lignes qui desservent la Boucle et la banlieue périphérique qui se limite aux Chaprais, à Saint-Claude et à Saint-Ferjeux.

Flore et tram vers 1900
La Place Flore vers 1900. La voiture du tram visible à droite est là sur la ligne 3 qui relie la Place Flore au Cimetière des Chaprais par la rue de Belfort et la rue de l’Eglise. Le raccord avec le réseau général se situe à hauteur de la rue de la Cassotte.

tram Belfort église
La ligne 3 quitte la rue de Belfort à l’Auberge du Cheval Blanc pour la rue de L’Eglise

Tram Chaprais Préfecture et pub

Le terminus de la ligne 3 à l’entrée Nord du Cimetière des Chaprais.
Chaque parcours est divisé en tronçons. L’usager paie au receveur les segments parcourus, en général 10 cts pièce. Chaprais-Préfecture coûte 20 cts.
Le manque de fréquentation fait que cette ligne est déposée en 1913 et remplacée par une nouvelle ligne empruntant la rue de Belfort du pont sur la voie ferrée (rue Résal) à la rue de l’Industrie où elle rejoint la voie de la Viotte.

C’est sur la ligne Viotte-Préfecture que survient le mercredi 23 décembre 1908 à 13h30 un accident spectaculaire. Au départ de la Viotte la voiture N°7 n’ayant à son bord que le watmann Guérin et le receveur Rancey prend trop de vitesse. Le frein moteur est impuissant à la réduire. Guérin s’empare du frein à main mécanique, mais la manette lui reste dans la main. Il se précipite sur la plate-forme arrière ou l’autre manette n’est pas à sa place. Trop tard. Le tram emballé déraille à l’aiguillage de la ligne 3 au Sud de la Place Flore. Il monte sur le trottoir de droite en descendant l’Avenue Carnot, heurte 2 vitrines de magasins puis se couche dans un grand fracas en travers de la chaussée.

tram renversé en décembre 1908

La voiture N° 7 est complètement disloquée. A l’aide de crics et de vérins les ouvriers de la C.T.B. redressent ce qui peut l’être. Dans l’après-midi, le châssis est remorqué jusqu’au dépôt à Isenbart.

tram renversé avenue Carnot 1908
A gauche, le tram couché sur le flanc. Dans sa course folle, il a arraché les boiseries et brisé les vitres du restaurant Kopp et de la boulangerie Gardet au 31 de l’ Avenue Carnot. Miraculeusement il n’y a qu’un blessé, le receveur Rancey souffrant de légères contusions. Il est conduit à la Pharmacie Cenay, en face où le docteur Biétrix exerçant au 20 Avenue Carnot vient l’examiner. La Compagnie du Tram Bisontin le reconduit à son domicile rue du Petit Battant… en fiacre.
tram renversé 1908
Jusqu’au soir, les badauds s’agglutinent sur les lieux de l’accident rouverts à la circulation. Les langues vont bon train, y compris parmi le personnel de la Compagnie. La vétusté du matériel est mise en cause tout comme la trop grande vitesse du tram sur des pentes comme la rue Battant et l’Avenue Carnot.
Immergé en pleine circulation, le tram accrochait souvent. Aux Chaprais, les dégâts ne furent que matériels. Ce ne fut pas toujours le cas. On déplora 3 morts en 1899 au pont Canot où le tram plongea dans le Doubs, ce qui nous valut un dessin en couleurs couvrant toute la une de « l’Illustration » le « Paris Match » de l’époque. Une passagère décédée lors d’un déraillement dans la rampe des abattoirs. Les piétons étaient également très exposés.
Une marchande de 4 saisons pressée par le tram, meurt de peur en poussant sa baladeuse.
Autre accident mortel, un sénior malentendant surpris lui aussi.


Les rails du tram étaient la hantise des cyclistes (çà l’est toujours)

Avenue Carnot Tour de France 1937
En 1937, on n’hésite pas à faire passer le Tour de France par l’Avenue Carnot
Le tram avait ses détracteurs. Dans sa gazette « Le Canard Comtois » Jack Mauvilliers dans les années 30, le cible régulièrement dans des billets satiriques du genre « accident entre le tram et une barque lavandière ». Le tram avait aussi ses habitués qui le célébrèrent en chansons.
A plusieurs reprises, avant la Seconde Guerre Mondiale, la municipalité Siffert tente de le remplacer rue de Belfort par un bus plus performant. Elle y renonce dissuadée par le coût entraîné par une telle modification du contrat. Le tram de l’époque n’était pas conçu comme un service public de transport. L’entreprise était privée.
Ironie de l’Histoire : le dernier tram qui rejoint le dépôt d’Isenbart en décembre 1952 vient de la rue de Belfort.

Article de Christian Mourey

Ne pas oublier réunion d’histoire jeudi 9 décembre à 15 h salle 4 du Centre Pierre Mendès France sur 100 ans d’histoire des Chaprais en suivant quelques rues de la Gare à la place Flore, l’avenue Carnot etc ...