La belle aventure du Chaland

La belle aventure du Chaland

Actualité : le Chaland est à vendre !

 Davy Ruffin, propriétaire depuis huit années, met en vente 350 000 € le célèbre établisement. Il s’agit d’une péniche Freycinet amarrée (sans moteur) au Parc Micaud. Elle dispose d’une surface totale de 385 m² sur deux niveaux aménagés en bar et restaurant.

 

 

Le parc Micaud fait partie des Chaprais. Aussi, la péniche Le Chaland aménagée en restaurant, amarrée à l’extrémité du parc peut être considérée comme étant aux Chaprais. Elle  est devenue, au fil des ans, un des éléments familiers du paysage de ce parc. Mais qui a eu l’idée de ce restaurant ?

 

Le Chaland aujourd’hui : photo Alain Prêtre DR

C’est un bisontin novateur Michel ZINGG. Après avoir travaillé plusieurs années au Maroc et en Haute-Volta (actuel Burkina Faso), il rentre à Besançon et achète avec son épouse un petit hôtel restaurant au bord du Doubs. L’affaire marche bien et comme Michel est musicien (il joue de l’accordéon et du bandonéon), il transforme rapidement le commerce en dancing.

Michel Zingg Le Chaland

M. Michel Zingg, en mai 1966, à la barre du Chaland

(photo B. Faille site mémoirevive Besançon)

Déjà propriétaire de l’hôtel Belvédère, le couple cherche autre chose : il a tout d’abord l’idée d’aménager un restaurant dans un avion : mais cela s’avère compliqué et nécessite beaucoup de frais.

Restaurant Le Belvédère Mazagran

Hôtel Le Belvédère, chemin de Mazagran (photo archives familiales DR)

Aussi se rabat-il sur une péniche, appartenant à Solvay lancée en 1904, affectée au transport des minerais. Désaffectée, elle est amarrée à Saint Nicolas du Port à côté de Nancy. Le couple l’achète et la fait conduire au chantier naval de Chalon sur Saône. Il faut lui donner du poids avec du béton. Moteur démonté, il convient de la remorquer jusqu’à Saint Symphorien. Puis de la tracter jusqu’ à Besançon. Pour qu’elle puisse passer sous les ponts, des tonnes de sable sont déversées dans la péniche. Le voyage dure 5 à 6 jours, avec Michel, comme guide sur les chemins de halage. Mais lorsque la péniche passe devant le Belvédère, Yvonne ne la voit pas : elle dort car elle a travaillé la nuit précédente. La péniche est donc emmenée au port fluvial de Rivotte où l’aménagement sera terminé.

Michel aurait préféré l’amarrer alors près de la presqu’île Saint-Pierre ; mais le Maire, Jean Minjoz lui a expliqué qu’il y avait un projet de création de théâtre. « …Or il n’était pas possible d’installer un restaurant licence 4 à proximité d’un établissement public. Même à Micaud, j’ai eu des problèmes à cause de la gare de la Mouillère j’ai dû rallonger les passerelles de 1,50 m pour être à 150 m de son entrée ».

péniche Le Chaland en 1970

Mars 1970  (photo B. Faille)

Dans son édition datée du 26 mai 1966, l’Est Républicain titre :

Croisière immobile… et bien arrosée sur le « chaland » dont on fêtait le lancement.

Le Chaland inauguré Est 26/5/66

Ils furent, hier soir, plusieurs centaines de bisontins privilégiés à fouler d’un pied marin la moquette verte olive du « Chaland » le luxueux bateau restaurant amarré sur les rives de la promenade Micaud, entre Bregille et le pont de la République.

Yvonne Michel Zingg et Pinel

Au centre de la photo, Yvonne et Michel Zingg les propriétaires du Chaland

A droite, de profil, M. Jean Pinel, Président du syndicat des hôteliers restaurateurs

Verre de champagne en main, chacun des invités put, une heure durant, se donner l’illusion d’une croisière immobile… avec sa décoration « maritime » où l’acajou des panneaux et du mobilier Régency se marie  avec le cuivre des hublots et des lanterneaux – ceux-ci authentiques, puisque provenant d’un authentique pétrolier marseillais – « le chaland » est une réussite artistique dont le mérite revient au décorateur M. Ballay et aux entreprises qui ont travaillé à la décoration intérieure du navire.

Vestiaires, toilettes très modernes, bar orné de cordages, escaliers de bois sur lesquels veille la Sirène de Georges Oudot,

Le Chaland sirène Oudot

Entrée avec au mur La Sirène de G. Oudot (photo archives familiales DR)

constituent avec les deux très belles salles au décor à la fois intime et élégant, un ensemble de grande classe…

../..L’éclairage a été particulièrement soigné : on a beaucoup remarqué les lampes provenant de la soute à munitions du navire école « Jeanne d’Arc ».

Les cuisines très bien équipées n’ont pas été négligées : 5 personnes y travaillent : le chef Jean-Marie MEULIEN et son second Michel GERMAIN ainsi que 2 commis et 1 apprenti.

cuisine du Chaland

L’équipe en cuisine (photo B. Faille)

Bref, tout a été conçu pour conférer au « Chaland » un petit je-ne-sais-quoi… qui sent le grand départ vers les îles.

Le Chaland restaurant la calle

La salle de restaurant dans la calle (Photo AF DR)

salle de restaurant du Chaland

La salle au 1er (photo AF DR)

Combien de marins, combien de capitaines ont, hier soir, apprécié l’accueil courtois de M. et Mme. Michel Zingg, « pachas » du bord et hôtes empressés ! On peut écrire que le tout Besançon était présent ou représenté. M. Jean Pinel se faisant l’interprète des invités, remercia M. Zingg de son hospitalité et le félicita chaleureusement avant de porter un toast à la prospérité de l’établissement.

À défaut de briser la bouteille symbolique sur la proue du « Chaland », les invités ont préféré vider le contenu de celle-ci… et de combien d’autres !

En 1970, Le Chaland décroche une étoile au guide Michelin et trois fourchettes.

Est 16/2/2002 étoile au Chaland

 « Lorsque j’ai obtenu mon étoile au Chaland, en 1970 il y avait 15 ans que les établissements bisontins n’en avaient pas eue. Vous ne pouvez pas imaginer ce qu’une étoile signifie ! J’ai reçu les réservations du monde entier. Et Michel Zingg de sortir les lettres venues de New York, Los Angeles, Bruxelles… missives religieusement conservées» déclare Michel Zingg, en 2002 à la journaliste de l’Est Républicain, Annette Vial…

 « Hélas, en 1973, un incendie vient mettre fin au rêve de « deux étoiles » que caressait déjà Michel Zingg. « Après deux ans de fermeture, j’ai dû recommencer à zéro avec un restaurant plus simple, un décor moins luxueux. C’est alors que nous avons transformé le bas du bateau en night-club indépendant. »

En 1978, M. Zingg vend « le Chaland » qui sera repris en 1980 par la famille Bertin dont le fils, Patrick, est aujourd’hui (en 2002) le propriétaire.

« Cette étoile, conclut M. Zingg, ce fut une merveilleuse aventure. Mon seul regret, c’est de ne pas être allé plus loin ». (Est Républicain du 16 février 2002)

Depuis, Le Chaland a changé plusieurs fois de propriétaires. Mais il est toujours là, amarré au même endroit. Le lieu est toujours réputé.

Le Chaland passerelle

 Le Chaland aujourd’hui (photo A. Prêtre DR)

Sources : Mme Yvonne Zingg, mémoirevive Besançon

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