Portrait de Roland Vittot, l’ajusteur, un chapraisien célèbre

Portrait de Roland Vittot, l’ajusteur, un chapraisien célèbre

Lip l’a révélé, l’histoire d’un militant revenu près de son usine des Chaprais

Au grand dam de son épouse, c’est une vedette dont la photo s’étale sur le journal à toute occasion, récemment pour fêter les couples au Kursaal ou pour le rôle des Ukrainiens à la Libération … Roland Vittot a accepté de recevoir le rédacteur de chaprais.info pour retracer quelques pages d’une vie très riche.


Roland Vittot en 1974 B Faille
Roland Vittot photographié par Bernard Faille en 1974

Mais qui est-il vraiment ?

Depuis quand aux Chaprais ?
C’est depuis 2008 que nous habitons dans un appartement, à deux pas de l’usine Lip où j’ai commencé à travailler en 1956. Auparavant j’habitais faubourg Rivotte.

Une origine franc-comtoise ?
Oui, je suis né le 4 février 1933 à Chaux-les-Passavant dans une famille de 7 enfants (cinq garçons et deux filles). J’ai rencontré mon épouse Fernande originaire, elle aussi d’un village du Doubs, lors d’une réunion familiale chez un oncle à Bregille. Le 12 juillet 1958, j’ai épousé Fernande Grisot, née le 19 mars 1931 à Vaudrivillers (Doubs), fonctionnaire au ministère de l’Equipemen. 65 ans de mariage

Ma famille était paysanne et catholique pratiquante. J’ai fait ma communion et je me suis marié à l’église. Étant enfant, j’aimais bien aller avec le curé qui nous sortait, faisait faire du sport ce qui faisait parfois râler mon père, car il y avait toujours quelque chose à faire à la ferme !

Puis, ce fut le départ pour la ville et la métallurgie ?

Oui, après l’école primaire, je me suis dirigé avec un copain vers la préparation d’un CAP d’ajusteur, d’abord à Sochaux et Gray puis finalement à Vesoul.
Quel a été le premier employeur ?
Le CAP obtenu en juin 1951, je me suis présenté aux Compteurs en novembre, mais on n’a pas voulu de moi à cette date alors que d’autres étaient arrivés en juillet.


place Leclerc, rue Voirin 1959 Faille

J’ai été embauché chez Douge, place Leclerc où l’on fabriquait des tracteurs de marque Messidor.

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Et l’horlogerie ?

Après quelques mois chez Douge, j’ai été embauché chez Lip rue des Chalets pour un emploi nécessitant davantage de précision. Une embauche interrompue par le service militaire et un rappel pour la guerre en Algérie.

Le personnel à la sortie des usines Lip rue des Chalets

L’entreprise Lip occupait presque toute la rue des Chalets à l’époque ?
Oui, il y avait des bâtiments de chaque côté de la rue et une passerelle.

Lip rue des Chalets eb 1960
Je travaillais à la mécanique, au milieu, là où se trouve le Dojo. Il y avait trois étages pour la mécanique, la plus fine étant au dessus. L’horlogerie était en face. Je me souviens du garage à vélo au bout de la rue.

Lip ouvrières

La mécanique était un monde d’hommes, mais l’horlogerie embauchait surtout des femmes ?
Oui, une très grande majorité de femmes. On se voyait assez peu. Il faut dire qu’on arrivait souvent en courant, de la ville ou de la gare de la Mouillère. C’est ainsi qu’un jour, je me suis fait renverser à l’angle de la rue de la Mouillère.

Comment vous êtes vous organisés syndicalement ?
Il y avait déjà la CGT assez forte avec des têtes comme Mercet, Mayot et Madame Dartevelle. De notre côté, avec Charles Piaget et quelques autres, on a a constitué une équipe à la CFTC. Je me suis présenté comme délégué du personnel. Puis j’ai été élu au Comité d’hygiène et de sécurité. On se réunissait une fois par mois chez l’un, un chez l’autre et parfois un week-end entier à Vercel. On voulait comprendre comment fonctionnait l’entreprise, étudier les décisions parfois contestables du patron. Si besoin, on se faisait aider par un cadre de la galvanoplastie qui nous soutenait. Après mai 68, on se réunissait toutes les semaines. Puis on a tous (sauf une) choisi la transformation en. CFDT. On se réunissait avec des militants d’autres entreprises de la métallurgie. Mai 68 a pas mal bousculé les choses. Et bien sûr, la grève de Lip à Palente. Mes parents ont bien suivi, ils sont venus aux portes ouvertes, mais ma belle-mère m’a foutu à la porte !

Le conflit de lip à Palente, tout le monde en a parlé, que faut-il en retenir principalement ?

C’est la force collective, la force de la section syndicale autour d’une équipe solide.
Lip Roland Vittot et Burgy

Il y avait les AG, les votes


Lip vote accords Vittot

les manifestations.

grande marche pour Lip Sept 73

La plus spectaculaire fut la grande marche (sous la pluie) le 29 septembre 1973


J’ai beaucoup voyagé à cette occasion. Avec la CFDT ou le PSU, on était invité partout pour parler du conflit et vendre des montres, j’ai été de Marseille à Lille !

Le PSU a été un autre engagement avec un mandat de conseiller municipal ?

En fait, c’était surtout la même équipe. Puis avec Paulette Guinchard et Claude Magnin, on a été élu au conseil municipal sur la liste de Robert Schwint de 1983 à 1989


Roland Vittot, Paulette Guinchard liste Schwint

Et après l’horlogerie, quelle reconversion ?

Je n’ai pas eu le temps de réfléchir à ma reconversion. Je suis devenu directeur d’une maison de vacances LVT à Clairvaux dans le Jura. Raguenès avait déjà organisé des séjours de vacances à Maîche puis Arc sous Cicon, ça marchait bien. J’y suis resté 6 ans. On recevait des gens qui venaient de partout. Je les emmenais marcher dans les alentours.


Quelles occupations pour la retraite ?

Maintenant, je ne fais plus grand chose. Auparavant, je me suis intéressé au patois que je parle couramment. On a publié un bulletin intitulé La Ticlette


La Ticlette patois

Voici un exemple de termes de patois

exemples de patois

Je jouais au tarot avec les frères Magnin et Paulette. Nous retournons parfois à la campagne. C’est l’occasion de retrouver les lieux et les gens de mon enfance à Chaux-les-Passavant

Quel avis sur le quartier des Chaprais ?

Roland Vittot retraité

En général, c’est assez calme. Le boulevard Diderot est parfois pétaradant. J’ai toujours envie de marcher. Cela se limite souvent à un kilomètre en restant sur le trottoir du pâté de maisons jusqu’à l’Intermarché. Je pousse parfois jusqu’à la place Flore, ou la rue des Jardins.

Source complémentaire lire l’article signé Gérard Magnin publié dans le dictionnaire Maitron du mouvement ouvrier

Photos : archives personnelles et Mémoire Vive

Categories: Actualités, Portraits