Pour une traductrice indépendante, le télétravail, c’est habituel

Pour une traductrice indépendante, le télétravail, c’est habituel

Interview d’une traductrice professionnelle dans le quartier des Chaprais

Ariane Bourjault traductrice

Un deuxième témoignage sur le métier de la traduction

Vous avez un bureau au 2 rue de Belfort pour quelle activité ?

2 rue de Belfort traduction

Je suis traductrice – uniquement à l’écrit –vers le français, ma langue maternelle. Je traduis à partir de l’anglais, de l’espagnol et de l’italien. La majorité des traductions que j’effectue concernent des textes rédigés en anglais à traduire en français. Même si l’anglais est considéré comme la langue de communication mondiale, il est encore indispensable de traduire de nombreux textes rédigés en anglais dans d’autres langues, car tout le monde est loin de (bien) comprendre cette langue.

Pour qui travaillez-vous ?

Je travaille principalement pour des organisations internationales de type ONU et des organisations non gouvernementales (ONG) basées à Genève. Ces organisations ont souvent plusieurs langues de travail officielles et ont donc besoin de faire traduire leurs textes dans toutes ces langues.

Quels sont les thèmes ?

Je suis ce qu’on appelle « traductrice de conférence ». Les organisations qui constituent mes clients tiennent régulièrement des conférences internationales, qui nécessitent des traductions en amont, pendant et à l’issue des conférences (rapports, matériel de conférence, courriers, enquêtes, etc.). Cependant, en dehors des périodes de conférences, de telles organisations élaborent de nombreux rapports sur leurs activités, alimentent leur site web, etc. et ont là encore, besoin de faire traduire leurs textes.

Quelle est l’importance de chaque commande ? Quel temps de travail nécessaire ?

Les demandes peuvent aller d’une phrase à plusieurs centaines de pages ! Un client peut avoir besoin de traduire un slogan (une phrase) ou son volumineux rapport annuel… Mais attention, la longueur d’un texte n’est pas corrélée à sa difficulté : traduire une phrase ou quelques lignes peut se révéler très ardu.

Combien ça coûte de faire faire une traduction ?

Il est impossible de répondre à cette question, car il existe de très nombreux tarifs et surtout différentes manières de facturer une traduction : on peut facturer la page, la ligne, voire le mot (ce que je pratique). Par exemple, le tarif au mot d’une traduction de l’anglais au français peut osciller entre 0,08 et 20 centimes, selon la difficulté et bien sûr le client… Un texte de 500 mots (une page environ) peut donc coûter entre 40 et 100 euros.

Quelles sont les difficultés du métier ?

Il peut être difficile d’anticiper la charge de travail sur plusieurs mois, mais parfois même aussi sur une journée ! Les urgences ne sont pas rares, mais les périodes plus creuses existent aussi. Outre les difficultés classiques de l’activité libérale (indépendante), des difficultés d’ordre purement « traductionnel » existent aussi : des difficultés pour trouver une terminologie exacte en français, la frustration liée au manque de temps pour réaliser une traduction parfaite, la nécessité de passer d’un sujet à l’autre, et donc, de devoir être une sorte de « spécialiste généraliste »…

Comment travaillez-vous ? Avec quels moyens ?

L’image d’Epinal du traducteur avec son stylo et son cahier poussiéreux est bien loin de notre quotidien…Je passe tout mon temps devant mon ordinateur. Une énorme part de notre travail consiste à faire des recherches documentaires et terminologiques. J’utilise à cette fin des bases de données spécialisées et des logiciels permettant de saisir très rapidement du texte. La majorité des dictionnaires que j’utilise sont au format numérique, mais j’utilise encore un ou deux ouvrages papier qui n’existe que sous cette forme.

Les logiciels de traduction automatique qu’on trouve sur Internet ne remettent-ils pas en cause le métier ?

Ces logiciels sont des outils formidables pour le quotidien, en voyage par exemple, ou pour comprendre rapidement et grossièrement un propos. Je les utilise moi-même pour les langues que je ne maîtrise pas ! Mais ils ne représentent en aucun cas une menace pour les traducteurs humains à l’heure actuelle. Comprendre un sens caché, trouver la terminologie appropriée, adapter une formule de politesse… tout cela, une machine ne sait pas encore le faire. Tant que les textes sont rédigés par des humains, ils seront traduits par des humains.

Faites-vous aussi de la traduction orale ? Simultanée ?

Non, je n’ai pas cette formation et cela me ferait très peur ! L’interprétation (et non pas « interprétariat ») est une activité qui exige des techniques très précises d’écoute et de reformulation, une rapidité d’exercice et une forte résistance au stress. En traduction écrite, nous avons davantage de temps pour faire des recherches et trouver le mot juste… mais les exigences des clients sont de ce fait souvent plus élevées.

Y a-t-il un lien avec le travail d’enseignant ?

Non aucun, si ce n’est pas le métier d’enseignant de la traduction. La traduction nécessite de maîtriser des langues (et surtout sa langue maternelle), mais il n’est nul besoin de savoir expliquer les règles de grammaire ou de conjugaison.

Quel a été votre parcours professionnel ?

J’ai obtenu un baccalauréat scientifique mention « européenne » au lycée Ledoux à Besançon, puis j’ai intégré l’Ecole de traduction et d’interprétation de l’Université de Genève. J’y obtenu plusieurs diplômes : une maîtrise (« licence » en Suisse) en traduction, un DESS en terminologie et un DEA en traductologie. À l’issue de mes études, j’ai tenté de me mettre à mon compte assez rapidement en Suisse, tout en occupant un autre emploi : sous-titreuse à la Télévision suisse romande pour les sourds et malentendants. Je suis revenue en 2008 à Besançon, d’où je suis originaire, pour exercer exclusivement l’activité de traductrice indépendante.

Depuis quand êtes vous installé aux Chaprais ?

J’ai intégré le bureau de la rue de Belfort en 2015, suite à la naissance de ma fille. Auparavant, je travaillais à la maison (aux Chaprais également !), mais à ce moment de ma vie, j’ai souhaité séparer géographiquement bureau et maison. Notre bureau est idéal, très bien situé. Je le partage avec Eric Alsruhe qui est spécialisé dans la traduction du français vers l’anglais. 

2 rue de Belfort et rue Klein mars 20

Le confinement ça change quoi pour ce travail ?

Le télétravail pour un traducteur indépendant, c’est banal. C’est notre modalité de travail, même dans un bureau extérieur au domicile. En ce qui nous concerne, nous avons bien sûr dû « fermer boutique » et quitter le bureau pour nous réinstaller chacun chez soi. Le peu de matériel qu’exige notre profession nous le permet aisément. Néanmoins, notre bureau et surtout l’ambiance de travail qui y règne nous manquent…

Ariane Bourjault traductrice

Quels sont vos liens avec le quartier des Chaprais ?

Crèche des Chaprais rue Suard

Les Chaprais, c’est mon quotidien ! J’habite dans le quartier, ma fille a tout d’abord fréquenté la crèche Chaprais, et elle est aujourd’hui scolarisée à l’Helvétie, je travaille rue de Belfort… J’essaie au maximum de privilégier les commerçants du quartier, ce qui est loin de représenter un effort, tant les produits proposés sont variés et de qualité. Et bien sûr, l’ambiance éclectique qui règne, à la fois populaire et « bobo », me plaît beaucoup.

Pour contacter la traductrice : abtraduction@gmail.com

Categories: Actualités, Portraits

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