La guerre de 1870 et le rôle d’Isabelle Febvay

La guerre de 1870 et le rôle d’Isabelle Febvay

Que s’est-il passé à Besançon pendant la guerre de 1870 ?

Le récit d’un témoin engagé rend compte de l’ambiance et de la situation dramatique.

Isabelle Febvay, était la femme du secrétaire général de la Préfecture de Besançon.

Elle a écrit jour après jour des notes destinées d’abord à ses enfants

Isabelle Febvay

Dans son avant propos, elle écrit :

Commencées le jour de la proclamation de la République, elles s’arrêtent à la fin de mars 1871. Elle a publié ces notes « à nos blessés, à nos morts de l’armée de l’Est, moi qui ai vécu leur vie qui a souffert de leurs souffrances. Pauvres enfants venus de toutes les contrées de France et des confins du désert africain » … « A eux est revenu l’honneur des derniers combats, et ils ont le droit d’écrire avec leur sang dans les neiges de Villersexel, d’Héricourt et de Cussey, la fière devise de la vieille Comté Rends toi, Comtois, Nenni, ma foi !

Par exemple, le 2 octobre « Hélas, c’est vrai Strasbourg est occupé par les Prussiens. La route de Belfort à Besançon se trouve ouverte à l’ennemi » …

Le 3 octobre, Ici la ville prend de plus en plus un aspect militaire, et pourtant il n’y a plus de soldats : c’est la garde nationale qui fait le service de place. … Il faudrait plus de cinquante mille hommes pour défendre la ville et nous n’avons que les habitants, quelques milliers à peine pour occuper tous les forts. Chacun se préoccupe d’abord des provisions à faire en vue d’un siège. …

Christian Mourey, membre de l’association Renaissance du vieux Besançon, a décrit la situation :

Christian Mourey raconte 1870

C’était un hiver implacable : « Il faisait – 22 °C »,  Fin janvier 1871, la guerre franco-allemande touche à sa fin : l’armée de l’Est du général Bourbaki, se replie sur Besançon puis en Suisse. C’est une armée en guenilles, sans vivres et confrontée à la neige et au froid.

Dans la ville de Besançon, « la situation sanitaire est catastrophique : l’hôpital, ses cours, galeries et jardins sont saturés de blessés et de malades ». Ils sont plus de 12 000 à avoir besoin de soins mais tout manque : il n’y a ni nourriture, ni linge, ni feu. « On meurt à même le trottoir et il y a à un certain moment jusqu’à 50 morts par jour ».

Cimetière des Champs Bruley

Les morts du cimetière des Champs Bruley

Au cimetière des Champs-Bruley, le cimetière le plus ancien de la ville (Il a été créé en 1792) 2 179 soldats sont enterrés parmi lesquels 600 Francs-Comtois. Et c’est là, au pied du monument inauguré en 1886, que l’association Avalfort avait décidé d’organiser la commémoration de la fin de la guerre (l’armistice général fut signé le 15 février). L’occasion d’évoquer les combattants d’alors mais aussi le livre d’airain de 12 feuilles où sont gravés les noms des 2 179 militaires

Au cimetière du Champ Bruley, en 1893, fut inauguré le livre d'airain au monument aux morts de la guerre de 1870/1871

Inauguration du livre d’airain

Placée sur ce monument, ces douze feuilles sont actuellement déposées au Musée du temps

Au début de l’année 1871, cette armée de près de 130.000 hommes devait tenir Besançon et dégager Belfort ;  victorieuse à Villersexel mais des unités badoises et bavaroises tournent autour, Moltke, le chef d’Etat-major prussien est déterminé à ne lui laisser aucun repos. Sans être vraiment vaincue, ses derniers éléments vont se diriger vers Pontarlier et les Verrières et se réfugier en Suisse.

Pascal Ducros
Pascal Ducros de l’association Avalfort a exposé à la presse le sens de cette cérémonie

Les quelques personnes réunies, ce 15 février, ont  voulu rallumé la « flamme », aux « Champs Brulés », devant la statue érigée à la mémoire des défenseurs. Et au delà de la cérémonie, elles avaient plusieurs objectifs :

  • Fédérer un peu les initiatives multiples et éparpillées qui éclatent sur le parcours de l’Armée de l’Est.
  • Associer le Besançon « officiel » à l’exercice de mémoire entretenu par nos amis suisses des Verrières.
  • Rééditer le livre d’Isabelle Febvay.
  • Dédier un espace public à cette dame (rue, place…)

Qui était Isabelle Febvay ?

Isabelle Febvay était l’épouse du Secrétaire Général de la Préfecture de Besançon lors de la Guerre de 1870. Agée de 30 ans, elle organise un service d’ambulancières dans des conditions terribles. Elle tient un journal de guerre du 4 septembre 1870 à fin mars 1871. Elle en a fait un livre qui a obtenu un Prix de l’Académie Française en 1914.

« Isabelle FEBVAY. La défense de Besançon.

Journal d’une ambulancière 1870- 1871 »

Isabelle Febvay journal d'une ambulancière

A l’occasion de ces évènements, elle a côtoyé Gambetta, Garibaldi, le Commandant Rolland, Bourbaki… Le jugement qu’elle porte sur les uns et sur les autres sera validé par l’Histoire.

En 1875, son mari est sous-préfet du Havre.

La reconnaissance officielle bisontine serait justice.

Le futur quartier des Vaites est une opportunité. Il est situé à proximité du Cimetière des Champs Bruley où sont enterrés 2 200 soldats morts alors de blessures et surtout de maladies dont beaucoup ont été accompagnés par Isabelle Febvay jusqu’à l’issue fatale, riche de sa seule humanité.

Isabelle FEBVAY, née Bernard, née à Châteauroux (36) le 16-07-1840.

Décédée à Cannes (06) le 12-08-1930

Joseph FEBVAY, né le 25-01-1829 à Rupt-sur- Moselle (88).

Décédé en 1908

Le couple eut 3 enfants, une fille et deux garçons. Nous retrouvons la famille à Paris, le 11 juin 1894, pour le mariage de la fille, Madeleine née à Besançon le 5 août 1872. Elle épouse Alexandre de Cesti en présence de Félix Faure, Ministre de la Marine. Madeleine est alors sans profession, comme sa mère, et demeure chez ses parents, rue Lauriston. Le père, Joseph Febvay est à cette date Conseiller de Préfecture Honoraire de la Seine.

Christian Mourey

Photos de Guy Renaud.

Relire les articles écrits sur la guerre honteuse et pourtant