Guerre de 1870 : Denfert-Rochereau, Garibaldi, Rolland ont une rue aux Chaprais pas Bourbaki

Guerre de 1870 : Denfert-Rochereau, Garibaldi, Rolland ont une rue aux Chaprais pas Bourbaki

1871 : Les Chaprais dans la tourmente, les chefs de guerre à Besançon

Une crise dynastique, des stratégies politiques en Prusse et en France, une célèbre dépêche et la guerre. Puis les noms de célèbres défaites françaises : Reichshoffen, Sedan, Metz,…. La résistance magnifiée de Strasbourg, Paris et de Belfort . La guerre de 1870-1871 est connue par ces événements, mais elle n’en pas moins « la guerre oubliée » des trois conflits franco-allemands, peut-être car la plus vieille, peut-être car la moins glorifiée par les manuels d’histoire.

Pourtant ce conflit est le premier moderne qui a touché la France tant dans les technologies utilisées, civiles et militaires que dans son intensité et sa cruauté dont certains contemporains nous ont en rapportés des traces.

Besançon et plus particulièrement le quartier des Chaprais n’ont pas échappé à la guerre. Si l’essentiel des faits dans le quartier a déjà été rapporté dans de précédents articles :

La guerre de 1870, une guerre honteuse et pourtant

La guerre de 1870 et le rôle d’Isabelle Febvay

Quelques autres éléments ont touché le quartier. Le premier d’entre eux est le passage de plusieurs célèbres généraux aux Chaprais.

Giuseppe Garibaldi

Giuseppe Garibaldi

Venu à l’aide de la jeune république française, le vieux révolutionnaire Giuseppe Garibaldi  établit son quartier général à Dole et organise le commandant des francs-tireurs (civils armés) de la région. En octobre 1870, le vieil italien (il est né à Nice en 1807) arrive en inspection dans la cité bisontine passant par le quartier de la gare « acclamé » par les soldats présents comme le revèle Philippe Bordone, l’adjoint du natif de Nice. La venue de Garibaldi n’est pas un hasard, il attend l’arrivée de troupes sous son commandement. Ces troupes de passage sont expédiés par Viotte dès le jour même vers Dole en même temps que le chef des chemises rouges  regagne l’ancienne capitale comtoise.

Bien que le personnage soit très controversé voire méprisé par les militaires classiques, le passage de Garibaldi a eu un impact positif sur le moral des troupes selon quelques témoignages. Le moral des soldats et des habitants ayant quelques jours plutôt été touché par la venue du général Albert Cambriels. Ce général arrive le 13 octobre par notre quartier à Besançon, il emmène avec lui les restes de son armée qui bat en retraite depuis les Vosges. René de Belleval, historien, sert alors comme soldat à Besançon. Il est témoin de cette arrivée. Il écrit « Ce qui reste de l’Armée de l’Est est logé aux Chaprais, où se presse une foule curieuse et presque hostile. Les feux de bivouac sont allumés dans les rues. Les corvées vont et viennent. Les estafettes et les ordonnances se croisent au galop… »

général Bourbaki

Une autre figure de la guerre passe par Besançon, mais n’ayant pas droit à une rue, il s’agit du général Charles Bourbaki. Arrivé début janvier, le grand officier a quitté quelques temps auparavant l’armée du Nord pour reprendre l’armée de l’Est que Cambriels ne dirige plus. Après plus d’un mois de préparatifs, Bourbaki et ses hommes se lancent en direction de Belfort qui résiste « Quand même » aux troupes prussiennes.  La cité de la Miotte érigera après guerre une statue portant pour nom l’expression précitée. Le héros de cette résistance, le colonel Denfert Rocherau a droit à une avenue à Besançon et au célèbre lion de Belfort sculpté par Bartholdi.

Lion de Belfort

L’Armée de l’Est remonte lentement la Saône puis le Doubs, les troupes allemandes réalisent depuis quelques mois des mouvements sur la Haute-Saône et la Côte d’Or.

armée en 1870-71

Début janvier, cette armée passe par Besançon. Alexandre Estignard alors magistrat à Besançon témoigne dans son journal « L’espoir renait : non seulement Bourbaki a commandé Besançon pendant plusieurs années, et a su concilier les sympathies de toute la population, mais on connait son ardeur, son intrépidité au feu et à sa faciliter à électriser le soldat ». La troupe de Bourbaki s’engage par Viotte, mais elle avance vers le nord en direction de Belfort. Après une petite victoire à Villersexel, l’armée trop lente à manœuvrer est battue sur la Lizaine vers Héricourt le 11 janvier 1871. La suite est connue, Besançon menacée, son armée défaite, Bourbaki bat en retraite. Répondant aux injonctions de Freycinet, le ministre de la guerre, il se replie à Besançon puis dans le Haut Doubs avec la suite que l’on connait.

Affaibli, Bourbaki tente de mettre fin à ses jours. Il restera en convalescence à Besançon jusqu’en février 1871.
Lire Le général Bourbaki  par François Bournand

Un marin à Besançon

Général Marius Rolland

Un autre militaire est célébré aux Chaprais par une petite rue. Henri-Marius Rolland, né à Marseille en 1821 est un capitaine de vaisseau nommé temporairement général de division durant la guerre franco-prussienne. Il assure, pendant deux mois et demi, le commandement de la 7e Division militaire et de la Place de Besançon. C’est lui qui doit organiser la défense de Besançon face au blocus imposé par l’armée allemande en janvier-février 1871.
Isabelle Febvay dans La défense de Besançon, journal d’une ambulancière fait le récit de la visite du général  dans les baraquements où sont rassemblés les soldats morts ou blessés. Un témoignage édifiant sur l’ampleur du désastre et sur le caractère de ce général.

Le général Rolland qui allait partout arriva la physionomie contractée, l’air mécontent … En cinglant l’air de sa cravache, il s’écria :
– ils sont tous morts !
– Non, lui répondis-je, il y a encore des vivants aujourd’hui; mais demain, ils seront tous morts de faim et de froid.
– Ah dit Rolland, vos vivants sont des traînards et je vais vous montrer comment on les traite. Ils fuient les combats pour se faire gâter par des âmes sensibles  …
Tout cela est dit sur un ton qui m’exaspérait et m’indignait. Il entra ensuite dans chaque baraque : même spectacle, même misère. …
Arrivé à la grille, il fondit en larmes et dit : quelle horreur ! jamais je n’ai  rien vu de pareil !

Voir aussi une publication sur Mémoirevive de Besançon

le livre d’airain du cimetière des Champs Bruley

qui dresse la liste des 2179 morts de la guerre de 1870 inhumés à cet endroit

Christian Mourey raconte 1870

Sources : Mémoire de guerre de Philippe Bardone et de René de Belleval, Journal d’Alexandre Estignard, Annales de l’Assemblée Nationale,  La défense de Besançon par Isabelle Febvay «