A voir à deux pas des Chaprais : les belles maisons de la rue des Fontenottes
Balade à la lisière du quartier des Chaprais pour découvrir les belles maisons de la rue des Fontenottes
Après l’incursion rue de l’Avenir, nous partons en balade rue des Fontenottes (qui signifie petites fontaines-petites sources) en suivant comme guide notre spécialiste de l’Art Nouveau : Jean Pierre Regazzoni
Cette rue parsemée de belles résidences longe la colline de Beauregard-Bregille : de la rue de la Mouillère jusqu’à Bregille village et Port Joint, séparée seulement des Chaprais par la ligne de chemin de fer des Horlogers. C’est une rue liée au développement du thermalisme à Besançon.
Petit rappel historique
La présence du fort de Beauregard, oblige le quartier à appliquer les contraintes militaires liées aux places fortes qui déterminaient les droits à construire en dehors des remparts.
Le projet de la promenade Micaud remonte à l’année 1830. C’est une initiative du maire de Besançon (de 1835 à 1845), Jean-Agathe Micaud (1770-1860) suite à l’assouplissement des règles de constructions par les militaires aux projets civils. Le parc est aménagé sur un espace marécageux bordant le Doubs. Le projet, conçu par l’architecte bisontin Alphonse Delacroix ne voit cependant le jour qu’en 1843, il est même agrandi à partir de 1881.
La nouvelle gare en dur sur le site de la Mouillère est inaugurée en 1884 en même temps que la ligne desservant la Suisse. Alfred Ducat en est l’architecte.
Ces aménagements ainsi que la cession de plusieurs terrains, vont permettre l’aboutissement du projet de Messieurs Boyer, Résal et Vialatte : la construction des Etablissements des Bains Salins avec le Grand Hôtel, le Casino et les Thermes, commencent à partir de début août 1891 et s’achèvent en 1893.
La première maison des la rue des Fontenottes daterait de 1883, voir plus loin le paragraphe consacré au N°14 la maison du peintre Emile Isenbart.
Pour entamer notre promenade, il faut traverser le boulevard Diderot et la voie de chemin de fer au niveau de la rue de la Mouillère.
Premier arrêt
Au N°2 : La gare du funiculaire avec sa voiture prête à partir à l’assaut du sentier de l’Aiguille, espoir de beaucoup de Bregillots et de Bisontins. Les Amis du Funiculaire entretiennent ce rêve….
Petit historique :
Le projet est lancé par Mr Emile Picard : industriel horloger et riche propriétaire terrien sur le plateau de Beauregard-Bregille. Il se montre soucieux de développer ce qui n’est alors qu’un village de 297 habitants, et par là même d’exploiter les nombreux terrains qui lui appartiennent afin d’en tirer profit. Dans un courrier à la municipalité daté de 1899, signé par une quinzaine de propriétaires de Beauregard-Bregille, il suggère la nécessité d’améliorer l’accès au site.
Le premier projet (1899-1902) : 287 mètres. Le deuxième projet (1905-1908) : 762 mètres. Enfin le projet voit le jour en (1912) : 423 mètres, dont 390 mètres du sentier de l’aiguille avec une pente de 21% ! Le dénivelé entre les deux gares est de 73 m. La voie du funiculaire est unique mais au milieu du parcours, elle est dédoublée pour permettre le croisement des deux voitures. Pratiquement le seul funiculaire en France à posséder un passage à niveau.
Le funiculaire aura un rôle décisif dans le développement de Bregille, pour les habitants de Bregille plateaux, qui utilisaient le funiculaire dans le cadre : de la vie de tous les jours, se rendre au centre ville (courses diverses, loisirs), professionnel (agriculteurs, ouvriers, etc…) sans oublier : le tourisme thermale (déclinant), les pensionnaires et personnels du nouveau préventorium. les militaires des forts de Beauregard et de Bregille, et les promeneurs du dimanche. La fermeture a été décidée en 1987
A côté de la gare du funiculaire (nous nous déplacerons, côté voie de chemin de fer)
N°4 Ateliers de l’horloger Tribaudeau, transformé en appartements et ateliers séparés.
Tribaudeau était une petite entreprise horlogère traditionnelle fondée en 1876 portant le nom de son fondateur, G. Tribaudeau. Avec sa marque Trib, l’entreprise vendait ses produits montres, chronomètres, réveils, bijouterie et orfèvrerie.par la vente par correspondance. On comptait une cinquantaine de salariés dans cette usine avant sa fermeture dans les années 1960. Cependant grâce à un repreneur, l’entreprise réussit à prendre un nouveau départ dans les années 1980 notamment grâce aux montres publicitaires, employant 54 ouvriers. en 1985
A côté des ateliers, la maison d’habitation de l’horloger G.Tribaudeau construite en 1895, reliée aux ateliers par une galerie fermée.
Façade en pierre (plaquage ?) avec piliers, linteaux (arc) de fenêtres et frises en briques vernissées.
Cheminées imposantes
Très beau Bow window
Consoles supportant l’avancée du toit en appui sur des corbeaux en pierre.
Toiture à pans multiples (influence orientaliste)
Appuis de fenêtres en bois
N°10/12 Villa de l’architecte G. Vieille construite en 1900, 2 appartements.
Construction en pierre Toiture en tuiles plates de différentes couleurs, à pans multiples, style orientaliste, avancée de toit en demi-croupe ;
Une engobée (entourée de violet) : sorte d’émaillage, qui contient plus d’argile dans sa composition que d’émail), au-dessus du numéro 10, indiquant la date de la construction : 1900
et 2 bow-windows, habillés de tavaillons peints
Un oriel en bois décoré de cabochons en céramique
Fenêtre en forme d’arc (demi lune), en briques rouges, fermées par un claveau en béton moulé ?, ouvragé.
Très beaux jambages soutenant l’arc de la fenêtre.
Mignonne maison de jardin
Au n°14 La première maison construite rue des Fontenottes, date de 1883. C’est la villa du peintre Emile Isenbart (1846-1921) L’artiste en est l’architecte. La propriété commençait au pied du fort de Beauregard et se jetait dans le Doubs. Pour la construction de la gare de la Mouillère, une partie importante du terrain a été expropriée.
Belle maison en pierre, toiture en ardoise à motifs bicolores
N°18 Très belle maison construite en 1910, de style classique, mais richement décorée
Oculus côté escaliers d’accès au fort, briques vernissées de couleurs différentes, 4 claveaux en pierre terminent la décoration
Fenêtre de l’étage en arc de briques vernissées colorées, fermé par une clé de voûte à motif émaillé.
Consoles supportant l’avancée du toit en demi croupe, celle-ci en appui sur des corbeaux en pierre.
Sous la fenêtre, un panneau d’allège en briques rouges décorées sous la fenêtre d’une métope représentant certainement un chardon (école de Nançy ?)
Autre métope sur la façade (fleur de chardon ?).
Détail d’un des appui de fenêtre en fer forgé mis en valeur par la couleur des fleurs décoratives.
Bandeau en céramique, motifs répétitifs, marque souvent l’étage, fait le tour de la maison.
N°20 Ce n’est pas la maison la plus belle, mais elle interpelle tout de même ! Maison simple, avec un grenier d’où l’avancée de toit. Celle-ci est habillée d’une volute en bois rappelant étrangement celle des fermes comtoises.
Le lambrequin de toit a deux fonctions : la première, décorative, la deuxième : contenir les écoulements de l’eau de pluie et à limiter l’humidité sur les façades (rôle des gouttières).
Le lambrequin de fenêtre est une constante de l’architecture urbaine du XIXe siècle et plus particulièrement haussmannienne. Les fenêtres de ces immeubles étant généralement dépourvues de volets, elles étaient munies de stores extérieurs et le lambrequin, outre son rôle décoratif, servait à cacher et protéger les rouleaux des stores. Aujourd’hui, ils remplissent la même fonction avec les volets roulants.
N°26 Une des plus belles maisons art nouveau de Besançon, sinon la plus belle. Construite en 1902, elle est l’œuvre de l’architecte Gustave Vieille, influence néocoloniale, tout ce qui est tendance à cette époque est présent sur cette maison : pierre de taille, faïence, briques polychromes vernissées, plaques en céramiques émaillées, mascarons, cabochons, vitraux.
Quelques détails :
Bow-window et/ ou oriel
Un mascaron en céramique, composée d’un visage de femme entouré de la date de construction de la maison 1902
L’entrée principale de la maison surmontée d’une toiture de style orientaliste.
Le pignon à gradins qui rappelle l’architecture gothique, est décoré de rosaces jaunes en faïence. Fenêtre en arc outrepassé (fer à cheval ouvert).
Le portail d’accès à la propriété de forme florale (feuille de nénuphar ?)
Métope en céramique
Photos de l’auteur
Ne pas hésiter à le contacter sur chapraispas.pas@orange.fr pour compléter les informations sur les constructions de la rue des Fontenottes, par avance merci
Sources :
-1850/1950 – 100 ans d’Architecture dans le Doubs – Véronique Gutton-Bon – CAUE du Doubs – Conseil Général du Doubs.
Mémoires de Bregille – Comité de quartier de Bregille – Editions Cêtre.
Les rues de Besançon – Eveline Toillon – Editions Cêtre
Histoire et formes urbaines -Ville de Besançon
Besançon memoirevive
Petit lexique pour les non initiés :
L’engobe est un revêtement mince à base d’argile délayée, appliqué sur une pièce céramique pour modifier sa couleur naturelle, pour lui donner un aspect lisse ou pour obtenir une couche de base aux propriétés physico-chimiques spécifiques réagissant avec l’émail.
En architecture, un mascaron ou masque, est un ornement représentant généralement une figure humaine, parfois effrayante, dont la fonction originale était d’éloigner les mauvais esprits
Une métope est un panneau architectural, élément décoratif, carré, rarement rectangulaire ou circulaire, toujours en relief…!
L’oculus est une petite ouverture de forme circulaire ou proche du cercle, munie ou non d’un panneau vitré. On en trouve souvent au sommet d’une coupole.
Un oriel est fenêtre ou baie vitrée en saillie, une avancée en encorbellement aménagée sur un ou plusieurs niveaux sur la façade d’un bâtiment. Terme assez proche de bow-windows qui au sens strict est une avancée en arc de cercle (rare)