Qui était René Mussillon qui joua un rôle important pour la Libération de Besançon le 8 septembre 1944?
On ne peut évoquer les combats de septembre 1944 pour la libération de Besançon, la stèle de la résistance de la place de la Liberté à Besançon, sans évoquer le rôle joué par René Mussillon qui était alors secrétaire de police au poste des Chaprais . Il a été établi qu’il y a joué un rôle clé en entraînant au combat plusieurs dizaines de policiers. Grimpant lui-même sur un char américain il aurait donc participé activement à la libération de Besançon.
Le paradoxe, c’est que l’on sait peu de choses sur cette personnalité. Il est né à Besançon le 22 janvier 1910 de Joseph Edouard Mussillon, alors âgé de 43 ans, mécanicien de chemin de fer, d’origine suisse, et de Marie Prudant alors âgée de 37 ans. Le couple demeurait 18 chemin des Cras.
La première profession de René Mussillon est celle de mécanicien ajusteur avant de devenir secrétaire de police, comme l’atteste son livret militaire.
Il est alors décrit de la façon suivante : taille 1,71 m, visage rond, nez rectiligne, gros, menton à fossettes, cheveux châtains clairs, yeux châtains. Il devance l’appel le 15 avril 1930. Il est affecté à la base aérienne de Nancy où il obtient le certificat d’aptitude à l’emploi de mécanicien militaire d’aviation (il est reçu 2° sur 14). Le 16 octobre 1930, il est nommé caporal puis libéré le 11 avril 1931. Renvoyé dans ses foyers comme l’on disait alors… Il sera réformé temporaire en 1938 pour bacillose pulmonaire, maintenu réformé en 1939 puis déclaré bon pour le service armé le 24 mai 1940. Il est de nouveau affecté à la base aérienne de Nancy le 12 juin 1940 puis démobilisé le 22 juillet 1940.
Entré dans la police, on ne sait quand, on ne peut avancer qu’il a été affecté directement au poste de police de la place de la Liberté, là où il se trouve durant la guerre. D’autant plus difficile à dire que son dossier professionnel, conservé aux archives municipales (rappelons que c’est Pétain qui crée la police nationale à partir des polices municipales existantes), n’est pas consultable avant 2021 !
Il s’est marié le 7 novembre 1931 avec Marie Basset. Il divorcera le 17 avril 1951.
Nous trouverons trace, dans les archives de police, de son arrestation par les allemands le 25 mai 1944. Il est alors arrêté avec Jean Minjoz, avocat, 40 ans, futur maire de Besançon, demeurant alors 23 Grande Rue et père d’une fille de 13 ans précise ce rapport. Et également avec Louis Dubreuil, avocat stagiaire de 28 ans et père de 3 jeunes enfants. Il est précisé dans le rapport d’arrestation de René Mussillon, qu’il est père d’une fillette de 11 ans. Il est donc arrêté, emprisonné une semaine et interrogé à deux reprises, plus que brutalement par les allemands. il sera libéré faute de preuves. Il déclarera plus tard avoir eu 2 ongles arrachées, les incisives supérieures brisées et les vertèbres lombaires enfoncées à coups de matraque! Son état de santé, constaté en 1958, lui vaudra d’être rayé de son affectation spéciale. Il est bien relevé par la commission des arthralgies vertébrales surtout cervicales et lombaires, des problèmes cardiaques et une édentation partielle. Il n’a alors que 48 ans !
Dans un dossier qu’il a rempli lui-même, pour une décoration il écrit quant à son rôle à cette période :
» Aide aux français recherchés par la milice et les allemands.
Fourniture de renseignements.
Recrutement et mise sur pied d’une section de 2 groupes de 50 hommes chacun. Du 6.06.1944 au 20.08.1944 instruction avec des armes parachutées.
Préparation des mes 100 hommes.
Du 20.08.1944 au 7.09.1944 harcèlement des allemands et sabottage de leurs panneaux indicateurs (1 tué).
Le 7.09.1944 à 12h00 ordre d’attaque. Combats toute la journée et la nuit sur les arrières gardes de la 19° armée allemande. »
M. Bernard Carré qui a effectué des recherches sur les combats pour la libération de Besançon a retrouvé un rapport du lieutenant Ed. Marnotte qui précise le rôle des uns et des autres, en particulier celui de René Mussillon. Le lieutenant Marnotte, après avoir pris contact, le 7 septembre 1944 après-midi, avec un lieutenant de l’armée américaine est incité à rejoindre le groupe formé en avant poste à Palente et composé de 3 chars lourds et de 4 automitrailleuses. Trois groupes furent alors composés, avec dans le premier, René Mussillon à la tête de plusieurs policiers. Ils grimpent sur le char américain (voir photo ci-dessous). Les allemands sont alors retranchés dans le quartier de Saint-Claude et c’est là que 3 policiers du groupe Mussillon furent tués : Louis Renaudin, Eugène Renaud et Jean Robert (lire leur portrait sur ce site web).
Le livret militaire de René Mussillon note son appartenance aux FFI du Doubs, groupe B.E. de la SRD 2 du 1/09/1943 au 15/09/1944. Ses services seront vérifiés en 1950.
Il a obtenu la médaille militaire, la Croix de Guerre avec palmes et la Croix de Combattant Volontaire en 1958.
Lors de la cérémonie d’inauguration de la stèle érigée en souvenir des 24 Résistants tués lors des combats pour la libération de Besançon, le 17 novembre 1946, il prononcera un discours vigoureux, rappelant la lutte tragique qui, partie de la Place de la liberté, s’acheva à Saint-Claude ; il souligna avec raison le rôle de nombreux policiers bisontins qui se distinguèrent dans ce combat, les opposant à ceux qui oublièrent leur devoir de Français ; il exalta ceux qui tombèrent pour nous donner des « lendemains qui chantent » et qui referaient le chemin s’ils devaient le refaire, suivant la magnifique formule de Gabriel Péri allant à la mort. Il termina sur un appel à l’union.
René Mussillon est décédé à Dole le 6 octobre 1999. Malgré notre appel à témoins dans cette région, nous n’avons pu obtenir aucun renseignement complémentaire. Il est enterré au cimetière des Chaprais. Nous avons tenté, à deux reprises, lors de la Toussaint, de joindre d’éventuels descendants en laissant un message sur sa tombe. En vain !
Si vous pouvez témoigner sur cet homme au passé exemplaire, n’hésitez pas à nous contacter !
Une autre personnalité homonyme existe également : René Mussillon, toujours bien vivant, est l’actuel Président de l’association Résistants et Familles de Franche-Comté dont le siège est 2 Chemin de Maillot à Beure (25720). Nous vous parlerons de lui dans un prochain article. Il était un parent éloigné du policier résistant, habitait les Chaprais où ses parents tenaient un hôtel et eux aussi étaient engagés dans la Résistance à l’occupant.