La nouvelle visite du ministre Alfred Rambaud, le 24 août 1896, à Besançon, avec le ministre Henry Boucher…

La nouvelle visite du ministre Alfred Rambaud, le 24 août 1896, à Besançon, avec le ministre Henry Boucher…

Donc, notre compatriote bisontin Alfred Nicolas Rambaud est de retour à Besançon, le 24 août 1896 (voir le billet précédent en date du 13 août 2016 consacré à sa première visite le 1er août 1896).

Photo de la une du journal régional Le Petit Comtois qui rend compte de la visue des deux ministres à Besançon

La « Une » du Petit Comtois le 25 août 1896

Mais cette fois, il vient surtout afin d’accompagner un autre ministre, Henry Boucher, ministre du commerce, de l’industrie, des postes et télégraphes.

Voici les explications de cette visite telles qu’elles figurent dans le registre officiel des délibérations municipales (conseil municipal, réunion du 20 août) :

« M. le Maire rappelle au Conseil que, lors de sa visite à Besançon, M. Rambaud, ministre de l’instruction publique, avait fait pressentir que son collègue du commerce et de l’industrie, M. Boucher, viendrait prochainement dans notre ville.

M. Boucher vient de faire part à M. Rambaud de son acceptation définitive et, après pourparlers, la date de son arrivée à Besançon est fixée à lundi prochain à 11 h du matin.

Le conseil accueille cette nouvelle avec satisfaction et malgré le désir exprimé par ce ministre qu’aucune réception officielle ne lui soit ménagée, à l’unanimité il est décidé que M. Boucher, ainsi que son collègue M. Rambaud, seront priés d’accepter les honneurs qui leur sont dus.

A cette occasion, les résolutions suivantes sont adoptées: les deux Ministres seront reçus à la gare par M. le Préfet du Doubs et le Conseil Municipal auxquels se joindront les membres de la Chambre de Commerce.

A midi, un déjeuner auquel seront conviés M. le Préfet, le Général commandant le 7° corps d’aemée et M. le Président de la Chambre de Commerce sera offert par la ville aux Ministres et à leurs Chefs de cabinet dans la grande salle de l’Hôtel de Ville.

M. le Ministre du commerce devant prolonger son séjour dans cette ville jusqu’au mardi soir, la municipalité l’entretiendra de toutes les questions intéressant la ville de Besançon, notamment du projet de construction de l’hôtel des postes et lui fera en outre visiter notre École  Nationale d’Horlogerie ainsi que l’Observatoire et les principaux établissements industriels.

Une sous-commission composée de M. Gondy, Grosjean et Pateu sera chargée de régler les détails de la réception; les frais auxquels elle donnera lieu seront prélevés sur le crédit des fêtes publiques ».

Photo du ministre Henry Boucher à son bureau

Le ministre Henry Boucher

Qui est Henry Boucher? Il est nè en Lorraine en  1847 et meurt à Nancy en 1927. C’était un industriel papetier à Rambervilliers, dans les Vosges. Il a été député de ce département de 1889 à 1909, puis sénateur de 1909 à 1920. Il fut donc Ministre dans le gouvernement de Jules Méline du 29/04/1896 au 28/06/1898. S’il est aujourd’hui oublié, il a pourtant essayé de moderniser l’appareil commercial français en créant en 1898, l’Office national du commerce extérieur, office qui existe toujours.

Photocopie de la carte d'invitation officielle pour la réception offerte en l'honneur des deux ministres

Invitation officielle pour la venue des deux ministres

Dans son discours prononcé dans la vase salle des Pas Perdus de la gare Viotte de l’époque, en réponse aux quelques lots de bienvenue du maire de Besançon, notre ministre indique: 

« Je suis profondément reconnaissant de l’éclat que vous donnez à cette réception; le ministre du commerce très modeste en ses oeuvres n’est pas habitué à cette pompe. S’il est venu parmi vous c’est qu’il veut rendre hommage aux vaillants efforts faits par la population bisontine pour pallier la crise industrielle.

Je sais d’ailleurs que si vous avez voulu donner tant de solennité à cette réception du ministre du commerce, c’est que dans une précédente visite, M. le ministre de l’instruction publique qui m’accompagne avait tenu à être reçu avec la plus grande simplicité…. ».

Reportez-vous au billet publié samedi dernier à propos de cette visite du 1er Août : banquet à l’hôtel de ville de 80 couverts….illuminations depuis le Casino jusqu’au centre ville, etc.C’est ce qui est qualifié, en 1896, de réception modeste…

Photo du menu du repas officiel du déjeuner du 24 août, en mairie, offert par le conseil municipal

Menu du déjeuner officiel en mairie, le 24 août 1896

 

Le Maire n’oublie pas de présenter au ministre du commerce, le Président de la Chambre du commerce et de l’industrie, M. Dubourg. Huit voitures tirées par des chevaux (à raison de 4 occupants par voiture), selon un ordre protocolaire précis vont se diriger vers la Préfecture par le pont Battant, puis ensuite vers l’hôtel de ville pour le repas offert par le conseil municipal.

Photo de la facture du repas officiel offert aux deux ministres en mairie : les conseillers municipaux ont payé leur repas.

Facture du repas de 36 couverts offert par la municipalité : à noter que les conseillers municipaux ont payé leur repas.

 

Nouveaux discours : du maire, d’abord, M. Vuillecard qui indique : « …je vous présenterai les revendications de nos fabricants horlogers et autres ne doutant pas que tout votre concours nous sera acquis pour aider à réaliser des réformes depuis longtemps sollicitées »…

Réponse du ministre Henry Boucher : il « … rappelle que la première fois qu’il vint à Besançon, c’était en 1870 comme mobile des vosges. Il se souvient avec émotion de cette période de sa vie. Combien de progrès depuis.

Besançon est prête pour les luttes de la guerre, il faut qu’elle s’arme pour les luttes industrielles ».

Il y aura ensuite une réunion à la Chambre de commerce avec ses représentants, puis visite à l’Ecole d’Horlogerie, puis Grandvelle où est projeté la construction d’un Hôtel des Postes. N’oublions pas que M. Boucher est aussi ministre des postes et télégraphes…

Mais on a oublié d’apporter les plans et le dossier n’avance pas car si la ville est autorisée à solliciter un emprunt (de 3 à 400 000 frs), il y a désaccord sur le prix de location réclamée par la ville : 42 000 frs alors que la poste proposait 8 000 frs. Et on sait aujourd’hui que le projet Grandvelle fut abandonné pour une construction rue Gambetta….

En page 2 du Petit Comtois du 25 août 1896, la suite du compte-rendu de la visite des deux ministres

Suite du compte-rendu du Petit Comtois du 25 août 1896 page 2

Le lendemain, dès 7h30, visite de l’Observatoire (ouvert en 1885). A 9 h15 déplacement à Monfaucon et Saône. A 10h visite de 2 usine d’horlogerie dans la Boucle. puis direction les Prés de Vaux pour les visites de l’usine de soierie artificielle et des papeteries (n’oublions pas qu’Henry Boucher est industriel papetier dans les Vosges). Dans Le Petit Comtois de l’époque, il n’est pas indiqué où se déroule le déjeuner (sauf erreur de notre part). A 7 h du soit, il reçoit en préfecture M. Gondy président du conseil syndical de l’horlogerie. Puis direction les Chaprais pour un dîner au Casino de la Mouillère. Après le repas, théâtre pour le spectacle de la troupe de l’opéra comique qui donnait Carmen. Et feux d’artifice.

A noter que le directeur de la brasserie de la Mouillère -(qui deviendra plus tard la brasserie Gangloff, voir à ce sujet, nos billets publiés par ailleurs)- M. Boiteux fait goûter, au Casino, ses bières et attribuer la médaille d’honneur à son plus ancien ouvrier.

Le lendemain, dès 5h42 les deux ministres prennent, à la gare de la Mouillère, le train pour Morteau où se succèdent réceptions, visites (jusqu’à Villers le Lac), discours, toute la journée. Enfin, pour terminer la journée, Henry Boucher se dirige vers Neufchâtel, puis Genève, tandis que notre bisontin Alfred Rambaud rentre à Besançon par le dernier train au départ de Morteau!

Pour plus de détails encore, vous pouvez vous reporter utilement au journal Le Petit Comtois de l’époque.

Compte-rendu de la visite des ministres en page 2 du Petit Comtois du 26 août 1896

Le Petit Comtois du 26 août 1896, page 2

Enfin, vous l’avez compris, ces deux visites de ministres au mois d’août 1896, ne sont pas dues au hasard. Mais ajoutons qu’il était alors, de tradition, que les ministres profitent de la vacance des Chambres (Parlement) en août pour organiser des visites et rencontres en France.

Documentation et illustrations tirées des archives , bibliothèque municipale de Besançon.

 

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