Sans interruption et de manière exponentielle dans sa puissance, nous observons le délitement des organes qui, hier encore, nous semblaient immuables.[ .. ] Nous assistons donc au grand spectacle d’un monde finissant, et ce sont les générations présentes qui devront faire face, dignement, à son crépuscule.
Le constat peut sembler extrêmement sombre, son amplitude paralysante, son intensité étouffante, si bien que les alarmes qui retentissent toujours plus puissamment, se superposant dans l’atmosphère surchargée, semblent rendre la plupart d’entre nous sourds. Le déni fait norme, aujourd’hui encore. Mais oser adopter un regard lucide sur l’état du monde et sur sa trajectoire nous amène également, après l’effarement initial et le choc intime que cela produit dans un premier temps, à comprendre que cette décomposition, cette nuit profonde est un appel au jaillissement d’une aube nouvelle : alors les verrous cèdent, l’imagination est libérée, la créativité se déploie et s’immisce telle un fluide en tout espace.
La fin de ce monde, c’est la fin de la domination de l’Homme devenu strictement destructeur sur le vivant, la fin de l’empoisonnement des océans, de l’air, des sols, des espèces – y compris la notre, la fin de la marchandisation de tout, la fin du règne des algorithmes au mépris de toutes formes d’harmonie humaine, la fin des technologies qui externalisent l’intelligence des Hommes pour finalement les en priver, la fin de la compétition comme relation supérieure, la fin aussi du dogme de la croissance érigée en Dieu masqué, et de l’accumulation matérielle comme horizon indépassable.
Dès lors, dans nos esprits, l’effondrement entame sa métamorphose et nous apparaît comme une opportunité : celle de troquer un consumérisme exsangue et déshumanisant contre une élévation individuelle et collective radicalement nouvelle dont nous sommes capables ; et c’est à ce renversement d’imaginaire que cette série de toiles tente de contribuer.